• Le référendum helvète au sujet de l'interdiction de la construction de minarets en Suisse se solde, selon le journal Le Temps, par un "oui" estimé entre 57 et 59 %.
    Lancée par l'UDC, le parti de droite populiste, cette votation avait pourtant, selon les sondages et étant donné l'appel du gouvernement et de la majorité des partis politiques, vocation à autoriser l'érection de minarets pour les mosquées.

    Quelles étaient les craintes ? Sentiment de rejet de la communauté musulmane suivi d'une radicalisation des croyants.

    Mais pourquoi les pratiquants musulmans se radicaliseraient-ils alors que, contrairement à l'argument avancé par les tenants du "non" à l'interdiction, l'absence de minarets ne remet absolument pas en cause la liberté de culte garantie aux musulmans helvètes comme aux citoyens d'autres confessions ?

    Les Suisses n'ont pas refusé la construction de lieux de culte. Ils n'ont pas non plus exprimé une "haine" ou un "racisme" dirigé contre les musulmans. Ils ont signifié leur désaccord sur la présence de signes ostensibles de religiosité dans leur paysage urbain. Signes d'autant plus désuets que la fonction du minaret est de recevoir un muezzin appelant aux prières. Ce retentissement sonore particulier n'étant pas traditionnellement admis en pays laïc, on voit mal pourquoi des minarets inutiles seraient érigés.
    Autre fonction du minaret : le repérage en terres inconnues mais nénamoins amies pour les nomades des temps anciens de l'islam. On conviendra aisément que les plans de ville et les sites internet des mosquées renseignent, de nos jours, correctement les visiteurs sur les adresses de leurs lieux de culte.
    La symbolique sacrée se serait agrégée au fil du temps, le minaret affirmant l'unicité d'Allah. Seulement, en terres laïques, Allah ne règne pas en dieu exclusif sur la spiritualité.

    Les musulmans de Suisse qui se battent contre l'islam politique devraient plutôt se réjouir : un coût en moins à supporter pour le financement privé des lieux de culte.

    Un appel de cette décision pourrait avoir lieu devant la Cour européenne des droits de l'homme. Si tel devait être le cas, il resterait à espérer que cette dernière sache dissocier ce qui relève des Droits de l'homme de ceux de l'architecture dans le domaine public.

    NB : Le Dôme du Rocher et la mosquée Al-Aqsa sont dépourvues de minarets.


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  • La mort du jeune Bilal Ghanem en mai 1992 a été à l'origine d'un nouveau « hoax » sur Israël. Relatée par Carl Donald Boström dans le journal suédois Aftonbladet le 17 août 2009, elle est rapidement et mondialement devenue l'emblème d'un prétendu trafic d'organes commis par Tsahal sur de jeunes Palestiniens. Circulant sur internet à la vitesse de la lumière, cette légende urbaine n'a été véritablement remise en cause que par... Boström lui-même.
 Ne serait-il pas temps d'en parler ?

    Nul n'a oublié l'article du journaliste suédois Carl Donald Boström paru le 17 août dernier dans Aftonbladet. Nul ne l'a oublié, non parce que l'auteur et le titre du journal seraient universellement connus pour leur rigueur et leur intérêt, mais parce que M. Boström, avec son article « On pille les organes de nos fils », a été à l'origine d'une légende urbaine de plus démonisant l'Etat d'Israël.
 Cet article, aux sources non recoupées, avec pour unique « preuve » une photographie morbide, a circulé sur Internet comme une vérité révélée. Mais ce que personne ne s'est empressé de révéler depuis, c'est que le reporter est revenu sur ses déclarations.

    Journalisme ou militantisme ?
    Tout professionnel de l'information se renseigne sur ses sources pour évaluer leur taux de fiabilité et comprendre leurs orientations éventuelles. Cet acte déontologique a singulièrement été mis de côté par la multitude de sites « d'information » qui ont repris l'article en boucle et les forums qui se sont répandus en accusations dignes des diatribes anti-juives du Moyen Âge.
    A l'été déjà, pourtant, les détracteurs de Bolström tels que Barry Rubin, par exemple, avaient d'ailleurs qualifié ce dernier
    « d’activiste anti-israélien travaillant pour un tabloïd radical » et déploré qu’on s’attache à le dénigrer plutôt qu'à étudier la validité des témoignages rapportés.
    Un panorama rapide de la production du journaliste suédois indiquait déjà de quel point de vue se plaçait... son objectivité :
    ·
     Tårgas & Oliver, ABF, 1992 (Gaz lacrymogènes et olives).
    · 
    Faces of Jerusalem, Libris, 1993 (traduit en anglais) (Visages de Jérusalem).
    · 
    Inshallah, Ordfront, 2001 (traduit en arabe) (Inchallah).
    · 
    Muren, Leopard förlag, 2005 (Le Mur).
    · 
    Salam, Arena förlag, 2007.

    Des origines romanesques d'une information...
    Le texte relatant l’histoire des prélèvements d'organes sur Bilal Ghanem est extrait du livre Inshallah publié en 2001. A cette époque, l’accusation de crimes crapuleux de l’armée israélienne pour alimenter un tel trafic était passée inaperçue. C'est seulement huit ans plus tard, et grâce à une actualité américaine « providentielle », cette « information » romanesque devient un buzz mondial.
    Arguant qu'il n'y a pas de fumée sans feu, Boström a habilement intriqué son expérience littéraire de 2001 avec l'opération
    Big Rig conduite par le FBI, à l'issue de laquelle, en juillet 2009, 44 personnes ont été arrêtées pour corruption, blanchiment d’argent et trafic d’organes.
    Dans le sillage de ces arrestations, Boström entame une enquête, rencontre « 
    un grand nombre de familles en Cisjordanie et à Gaza  » et raconte « comment les organes de leurs fils ont été prélevés avant qu'ils ne soient tués.  » Ces témoignages, selon lui, illustrent le cas du jeune Bilal, mort dix-sept ans plus tôt. Estimant qu'aux rumeurs la preuve est apportée, il se lance...

L'article accusateur décrit donc une scène digne des romans de guerre américains : Bilal, le jeune « lanceur de pierres, caché dans les montagnes de Naplouse parce qu’il menait la vie dure aux soldats israéliens », la cigarette que l’on éteint, la canette de Coca que l’on pose et les tirs des snipers, une balle en pleine poitrine et une dans chaque jambe avant d'achever le jeune homme d’une balle dans le ventre pour enfin l'évacuer, « grièvement blessé », dans une Jeep.
    Les détails ajoutent à la tonalité dramatique du récit une puissance d'évocation digne des expressionnistes. De quoi enflammer l'imagination, et provoquer la levée de boucliers indignés que l'on sait.

    La preuve est à l'accusation
    Peu importe, pour le journaliste, que les trois actes d’accusation américains, bien que faisant partie de la même opération, ne soient pas liés entre eux. La corruption concerne des hommes politiques du New Jersey ; le blanchiment d’argent concerne des Juifs de Brooklyn qui sous couvert de dons à des associations caritatives israéliennes organisaient des évasions fiscales ; et le trafic d’organes concerne un seul homme : Itzhak Rosenbaum.
 Le business immoral du rabbin Rosenbaum consistait à convaincre des Israéliens nécessiteux de faire don d’un de leurs reins contre la somme de 10 000 dollars. Pour ce faire, il faisait voyager avec lui les donneurs, leur faisait passer toute une série de tests de compatibilité et organisait dans des cliniques privées le prélèvement et la transplantation simultanément. 
Aussi abjects que soient ces actes, il convient de noter que les donneurs étaient Israéliens et non Palestiniens, qu’ils étaient consentants, qu’ils n’ont pas été tués et que le seul organe prélevé était un de leurs reins.
    Si le diable loge dans le détail, ces faits cruciaux n'intéressent pas le moins du monde le romancier suédois. Rien de tel, en effet, pour un scoop sulfureux que d'associer les mots « rabbins, Juifs, Israël, argent » et « trafic d'organes sur des Palestiniens ».
    Pas plus, d'ailleurs, que ne l'intéresse de recouper les « informations » qui lui auraient été fournies dix-sept ans plus tôt par « 
    du personnel de l'ONU » (à 90 % palestinien en Cisjordanie) et selon lesquelles « des vols d’organes avaient certainement lieu, mais qu’ils étaient empêchés d’agir contre cela ». Pas un nom, pas une situation, pas un récit circonstancié : du vrai journalisme d’investigation !
    Pourtant, en pleine tourmente, le journaliste israélien Khaled Abou Toameh avait rencontré les parents de Bilal. Ces derniers avaient certifié n'avoir jamais dit ce que le journaliste rapportait dans son article. Pire : ils n’avaient jamais parlé à Boström !

    Mais cela n’avait pas suffit à établir le moindre doute : la rumeur avait pris corps, l’accusation s’était répandue dans le monde entier comme une preuve supplémentaire de l'immoralité des Israéliens, ternissant une fois encore l’image d’Israël. La Ligue arabe, l’Organisation de la conférence islamique et l’Autorité Palestinienne déclarèrent en chœur qu’il fallait condamner sans réserve les crimes commis par les « sionistes » sur les corps de ces jeunes Palestiniens.

    Un hoax peut-il avoir une fin ?
    Invité à une conférence sur le journalisme à Dimona, le journaliste suédois s’est dit surpris mais ravi de pouvoir défendre son travail devant un public pas toujours attentif à ses explications peu convaincantes.
    A la suite de cette conférence, Boström a été interviewé à la télévision israélienne par le journaliste Yair Lapid.
    Lors de cette interview, il a clairement dit qu’il ne croyait pas que les soldats israéliens se livraient à un trafic d’organes sur les Palestiniens. Il a de plus déploré l’exploitation antisémite de son article, arguant que la traduction anglaise n’était pas fidèle à ce qu’il avait écrit…
    Enfin, il a affirmé qu’aujourd’hui il écrirait son article différemment, signifiant par là qu’il était allé trop loin dans ses affirmations.
    De retour en Suède, Donald Boström a donné une autre interview à un journal télévisé israélien dans laquelle il a expliqué qu’il ne se rendrait pas à une conférence sur le journalisme prévue à Beyrouth
    parce que « j’ai compris que, cette fois-ci, il ne s’agit pas d’un événement journalistique professionnel, mais également d’un événement politisé. Je n’avais pas envie d’être associé aux déclarations de ces groupes politiques ».
    Il convient de reconnaître à Donald Boström un grand courage, car non content de revenir sur les déclarations de son article, il refuse les honneurs qui l’attendent dans des conférences destinées à exploiter la moindre « information », si peu glorieuse soi-elle, concernant Israël à des fins politiques plus ou moins avouables. Il reste à espérer que cet exemple sera suivi par d’autres, tel Charles Enderlin pour l'affaire Al-Dhoura dont on aimerait enfin qu'elle soit tirée au clair.


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  • Non. Légalité n'est pas légitimité, ainsi que le rappelle Gil Milhaely dans son excellent article sur le sujet sur Causeur.

    Plus encore, ce victimisme indigne du "dauphin" ironisant tristement sur les "requins" qui le dénigrent. Certes, Jean Le Fils fut indûment montré du doigt, en tant que Fils du Père par la majorité votante élue. Certes, il eut à subir le lot d'opprobre et d'injustices dont les hommes politiques font leur pain quotidien, et lui peut-être plus qu'un autre eu égard à son patronyme.

    Il n'en demeure pas moins que légalité n'est pas légitimité. Même si les quatre représentants de l'Etat s'abstiennent au nom du "Peuple". Quelle ironie, ce "peuple" dont le mandat vaut patte blanche. C'est d''ailleurs probablement ce qui, dans ce scandale républicain somme toute transparent - parce que les dynasties ont succédé au mérite vanté par not'président deux ans et demie plus tôt - est le plus désopilant. Arguer de la légitimité des élus, tandis que des milliers de Jeunes de l'âge de l'Elu, plus diplômés à défaut d'être plus aguerrris sur la scène politique, voire plus photogéniques, suent d'angoisse pour leur vie courte et celle que n'auront sans doute pas les enfants qu'ils ne mettront pas au monde.

    Comment peut-on oser en appeler au principe démocratique en de telles circonstances, alors que sont minés les fondements de la République, au vu et au su des votants. Ne nous voilons pas la face, le népotisme n'a rien de nouveau, les enfants d'ouvriers vous le diront, qu'ils s'appellent Duchmoll ou Ben Younès. La nouveauté, c'est la transparence éclatante. C'est l'affirmation décomplexée. Nicolas Sarkozy n'invente pas le népotisme, il le légalise, le légitimise.

    Au nom du suffrage universel, il l'institutionnalise.

    Et ce refrain victimaire Père et Fils, "à travers lui c'est moi qu'on vise", qu'est-il donc advenu du Saint-Esprit ?

    Les arguments sont tout aussi moroses que la gueule triste de Marianne. Jean, élu au Conseil régional, n'a pas le temps d'obtenir son diplôme de droit. Ma copine femme de ménage, si elle était élue, n'aurait pas le temps non plus.

    J'abhorre le populisme. Et je l'abhorre qu'il surgisse de bas-fonds ouvriéristes ou des Hauts-de-Seine.

    Le cinquième homme, selon Le Monde, serait favorable à la candidature de Jean. Saint Jean, priez pour nous du haut de votre patronyme. Décidément, Sarkozy est juste sarkozyste. Ma France, ma République, mon moral et mes espoirs ont pris l'eau.


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  • Nul besoin d'avoir un penchant pour « les affaires » ni non plus pour « les complots » quand s'installe un silence consterné autour du procès de la Scientologie qui se tient au tribunal correctionnel de Paris et dont le jugement est en délibéré jusqu'au 27 octobre après que le Ministère public ait requis la dissolution judiciaire de la secte pour escroquerie en bande organisée. Dissolution dorénavant impossible.

    Le silence médiatique sur cette affaire depuis une dizaine de jours s'explique-t-il par l'attente d'un jugement qui, sans surprise, ne sera pas la dissolution ? Il succède toutefois à une avalanche d'informations grâce auxquelles il n'est pas toujours aisé de comprendre pourquoi la secte, dans le collimateur des associations anti-sectes depuis de nombreuses années et qui a réussi à prendre pied en Espagne et en Russie notamment, menace de poursuivre son œuvre prosélyte en France.

    Des articles de journalistes et d'hommes de loi éclairent cependant le citoyen esbaudi qui, occupé à travailler plus ou à faire montre de bonne foi dans sa recherche d'emploi, éprouve ces temps-ci bien de la peine à décrypter les faits, les causes, les conséquences, dans les concerts d'indignation servis chaque jour au menu de la vie politique française. De scandales en brouhahas, les faits divers susceptibles notamment de fabriquer de la loi et du décret se succèdent à un rythme effréné. Et précipitation n'étant pas raison, il convient de s'y arrêter.

    Nul besoin donc d'être amateur de romans noirs ou paranoïaque excessif. Nul besoin non plus de manifester une nouvelle éruption d'antisarkozysme aigu au motif que le Président, qui prône une « laïcité ouverte », a reçu en grande pompe à Bercy en 2004, tandis qu'il était ministre des Finances, la star américaine Tom Cruise suspecté d'être devenu au fil des ans l'homme numéro deux de la secte. Et bien que l'acteur attaque en diffamation le journaliste Andrew Morton auteur d'une biographie non autorisée [1], deux extraits vidéo en accès libre sur Internet montrent de quoi il retourne lorsque, recevant une médaille aussi honorifique que kitch des mains de Miscavige, le dirigeant mondial actuel de l'organisation, l'ex-futur séminariste demande à une foule en délire si elle est prête à « nettoyer le monde ». Laquelle évidemment régurgite un oui massif avant de se tourner vers un buste de Ron Hubbard (écrivain américain de seconde zone, créateur de la Dianétique ou Scientologie) pour l'acclamer [2].

    Mais outre les aménagements législatifs express décidés par nos politiques sur pression populaire ou médiatique, des travaux de fond incombent aux parlementaires dont la mission consiste en principe à donner corps à la volonté de leurs administrés. En l'occurrence, le député UMP Jean-Luc Warsmann (3e circonscription des Ardennes), par ailleurs président de la commission des lois de l'Assemblée nationale [3], exprime très clairement sur son site la nature de ses devoirs et les engagements qu'il tient. Sur la liste des propositions de loi qu'il soumet figure celle dont il est question ici : la loi dite « de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures». C'est par elle que le scandale arrive : adoptée le 12 mai, elle rend caduque la requête du Ministère public, formulée un mois après sa promulgation...

    Les détails de rédaction de cet alinéa dont personne à l'Assemblée nationale comme à la Chancellerie, hormis l'honorable juriste Michel Véron en juillet, n'avait mesuré les conséquences, figurent sur le très utile blog de Maître Eolas, l'avocat qui explique aux quidams les arcanes d'un droit hexagonal de plus en plus labyrinthique et hermétique. A lire l'extrait incriminé, on comprend certes que les lignes fâcheuses aient échappé à la vigilance des lecteurs les plus avertis.

    Seulement il y a plusieurs problèmes. Cette suppression du pouvoir de dissolution d'une personne morale pour escroquerie a été adoptée sans débat et, selon le Figaro, « à l'insu des autorités judiciaires ».

    En outre, proposée le 22 juillet 2008 et mise en distribution le 5 août suivant, la loi a passé près d'un an dans un tiroir sans que quiconque ne la révise.

    Enfin, elle ne concerne bizarrement que la sanction de dissolution pour escroquerie et non, par exemple, pour abus de confiance.

    Révélé le 14 septembre par un communiqué de presse de la Miviludes [4] le bug juridique a évidemment mis en émoi tant la magistrature que le monde politique. Pour Corinne Lepage, par exemple, "un lobbying a été exercé en ce sens, même si je n'en détiens pas la preuve. La coïncidence est trop grosse. Par le passé, l'Église de scientologie a déjà profité de circonstances étonnantes qui lui ont permis d'échapper à ses procès" [5].

    Et il en effet permis de s'interroger sur ce nouveau couac au vu des fâcheux antécédents ayant déjà perturbé le déroulement d'actions à l'encontre de la puissante secte, comme le rappelle Marie-Anne Kraft sur Mediapart [6].
    Le budget pharamineux de la puissante secte autorise en outre à s'interroger.


    Pour remédier à ce cafouillage navrant, le Syndicat de la Magistrature ainsi que l'avocat de victimes Me Olivier Morice, ont demandé l'ouverture d'une enquête parlementaire [7 et 8] pour comprendre comment cette bourde venue à point au secours de la secte a pu être commise.

    Le même jour, Michèle Alliot-Marie répondait de façon très pragmatique et se voulant probablement rassurante à ces mises en cause. Evoquant une « erreur matérielle », la Garde des Sceaux, note Le Figaro du 15 septembre, a déclaré qu'elle allait «déposer à l'occasion du prochain texte pénal une mesure qui permettra effectivement de dissoudre notamment des associations, des groupes ou des sectes qui auraient procédé à des escroqueries», confirmant ainsi une annonce de la Chancellerie, la veille.

    Marianne en ligne du 1er octobre, rapportant les propos de Bernard Accoyer sur une « erreur de référencement sans interférence extérieure » semble pourtant annoncer que la messe est dite : « En clair, un fonctionnaire de l’Assemblée s’est trompé lorsqu’il a fallu relier le nouveau texte sanctionnant le délit d’escroquerie aux articles préexistant du code, en ne faisant pas référence à l’article prévoyant la dissolution. Pas de référence, pas de sanction. » Pourtant, si selon le président de l'Assemblée nationale la faute incombe aux politiques, le journal note, à raison, qu'il «  s’agit en fait d’une erreur d’un fonctionnaire de l’Assemblée ».

    La Garde des Sceaux avait par ailleurs ajouté que le droit français permet tout de même de prononcer une interdiction d'exercer sur le territoire national. Une peine jugée insuffisante entre autres par Me Morice, qui a adressé une missive au Président de la République [9], d'autant que, précise-t-il au Parisien, « d'autres affaires [relatives à l'Eglise de Scientologie] vont être frappées par cette modification ».

    Qu'attend donc M. Sarkozy pour répondre ?


    Note : à lire, cet excellent article paru le 21 septembre dans La Voix du Nord.

    [1] AFP, janvier 2008.

    [2] Ici, dans un entretien télévisuel, Tom Cruise exprime son enthousiasme et assure des miracles de la Scientologie. Par « nettoyage du monde », il faut comprendre « purification » des êtres humains considérés comme des sous-hommes sauf à grimper les échelons de la Dianétique. Ici, lors de la fameuse cérémonie.

    [3] « La Commission des Lois est l’une des 6 commissions permanentes de l’Assemblée Nationale en charge d’examiner les projets et les propositions de lois qui seront discutés en séance publique.  Composée de 73 députés issus de la majorité et de l’opposition, ses domaines de compétences sont multiples : droit civil (ex : mariage, filiation), organisation judiciaire ; droit constitutionnel et électoral, administration générale ; droit pénal et procédure pénale ; collectivités territoriales et décentralisation ; outre-mer ; sécurité et liberté publique ; droit administratif, fonction publique et réforme de l’Etat ; droit commercial et propriété intellectuelle ; législation générale. »

    [4] (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires)

    [5] Dans un entretien accordé au Point le 16 septembre 2009.

    [6] « - En 1998, une partie du dossier d'instruction s'était volatilisée comme par magie du palais de justice de Paris. Une chose qui n'arrive jamais, le rappelle Corinne Lepage, avocate de profession.

    - Un policier chargé d'enquêter sur la Scientologie avait été mis à l'écart lorsque Sarkozy était ministre de l'intérieur. Voir article de Libé. Comme le dit cet article de Betapolitique : "2002, Arnaud Palisson, en charge des sectes aux RG, publie sa thèse d’Etat à la Sorbonne et obtient la plus haute mention et les félicitations du jury malgré la saisine du Tribunal administratif par l’Eglise de scientologie. Favre, l’éditeur universitaire suisse le contacte et décide de publier cette thèse… et de la diffuser en ligne sur Internet. A partir de ce moment (Nicolas Sarkozy est ministre de l’intérieur), les pressions hiérarchiques sur M. Palisson commencent, et ce dernier est finalement « déchargé » du dossier des sectes, et remplacé par un inspecteur ne connaissant rien à la scientologie…" »
    (Il est rappelé dans le même article les propos tenus par Emmanuelle Mignon en 2006 et la nuance que le Président introduit dans La République et les religions entre sectes et « nouveaux mouvements spirituels ».)

    [7] http://www.syndicat-magistrature.org/spip.php?article970

    [8] http://www.humanite.fr/Une-loi-votee-par-l-UMP-evite-a-la-Scientologie-une-dissolution

    [9] http://preview.leparisien.fr/complements/2009/09/17/642074_une-lettre.jpg

     


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  • Certes, le ministre de la Culture, empressé à défendre Roman Polanski, eût été mieux inspiré de réfléchir à la position qu'il entendait adopter. Non seulement parce que le sujet sensible des crimes pédophiles attise des réactions aussi épidermiques que compréhensibles, mais aussi parce que les Etats-Unis, ou plutôt l'Etat de Californie, et précisément le procureur requérant, exercent, en demandant à la Suisse d'extrader le cinéaste afin qu'il comparaisse devant leur juridiction, leur droit le plus strict. Sans pour autant présenter ce visage hideux évoqué par Frédéric Mitterrand d'une Amérique capable du meilleur comme du pire.

    Aujourd'hui, après Marine Le Pen, le socialiste Benoît Hamon - sans, quant à lui, exiger le limogeage du ministre - condamne le romancier pour sa Mauvaise vie, dans laquelle, on le constate tristement en lisant les forums internet, il aurait en quelque sorte vanté les mérites du tourisme sexuel, voire encouragerait la pédophilie. Et un article de L'Express met le feu aux poudres sur le site où tout aurait commencé, Agoravox.

    Il est quand même utile de rappeler qu'un écrivain jusqu'à nouvel ordre est en droit de glisser les plis de sa plume dans les recoins les plus sombres de son âme, et de notre humanité. Rappeler, de manière plus prosaïque, qu'à aucun moment Frédéric Mitterrand, pas encore ministre à l'époque (2005), donc, pour les républicains purificateurs, pas encore tenu de n'avoir jamais écrit pour être digne d'exercer cette fonction - écrire est-il criminel ? quand bien même un écrit relate l'amour tarifé ; et que sait-on de ceux qui, du député lambda au vociférateur gamma, invoquent la morale due à la fonction, voire la Morale en soi ? que celui qui n'a jamais payé pour un fantasme lui jette la pierre - qu'à aucun moment, donc, l'écrivain n'évoque de quelconques relations sexuelles avec des mineurs. Il parle, certes, de "garçons". Comme tous mes copains pédérastes. "Garçon", pour tout homme jeune de moins de trente ans. Et le pauvre homme de faire l'exégèse de son dictionnaire personnel, acculé à l'explication, "garçon" ça ne veut pas dire "mineur". "Relations sexuelles tarifées" ça ne veut pas dire "pédophilie".

    Sans doute, en Asie comme en Afrique, en Arabie comme au Maghreb, en Europe comme aux Etats-Unis, la prostitution est le choix monstrueux de la survie au prix du corps bafoué, vendu à l'étal, ce "marché aux esclaves" dont l'écrivain avoue qu'il le fascine dégueulassement. Mais sordide en âme aussi, quand pour le prostitué autant que sa clientèle l'érotisme chante la disparition dans cet abîme de moiteur morbide et son corollaire l'extase de vie, brutale, amorale, bestiale ou doucereusement épouvantable que l'on a pu lire chez Gide, Genet, Duras... Baiser est une brûlure et n'a jamais été synonyme du très catholique "faire l'amour".

    Alors oui, l'écrivain Mitterrand a livré ses confessions un jour dans une biographie évidemment tout intérieure. Les biographes officiels feront le reste.

    En outre, ces politiques qui aujourd'hui s'insurgent, suivis par des rangs d'internautes préoccupés par des impunités juridiques en République, et ces mêmes internautes avec eux, ne les a-t-on lus et entendus, pendant l'affaire Levinski, railler le puritanisme américain...

    "De tels livres ne devraient même pas être publiés", ai-je entendu, "il y aurait moins d'horreurs dans ce monde". Alors, chers compatriotes, prenons nos responsabilités. Brûlons les œuvres faites d'autre chose que de bons sentiments, brûlons les écrits qui ne sont pas édifiants pour la morale, rendons à l'Enfer de la Bibliothèque nationale tout ce qui n'aurait jamais dû réchapper. La littérature est dangereuse : elle en rendrait certains pédophiles.

    Ce pourquoi sans doute, dans le même temps, un éditeur allemand refuse de publier son auteur parce que celle-ci a décidé de ne point se montrer précautionneuse. De mal parler. Du Coran. Sait-on jamais, ça pourrait rendre islamophobe.


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