• Alors au lieu de penser aux J.O. de Pékin, à la déclaration d'indépendance du Kosovo, aux corps déchiquetés en Irak et au Pakistan, aux simagrées de la majorité et de l'opposition, à ce brouhaha des vanités, à ces mots que tu voudrais écrire, à tous ceux que tu voudrais dire, et au coup de fil désobligeant au défenseur des droits de personne, tu prends ta veste, tu descends les premières grosses poubelles, celles qui préparent la suite, évacuations légères, les premiers renoncements indignes d'être transportés, la vieillerie administrative, les projets moribonds, les bouts de souvenirs de rien, les collections de journaux à porter à une association qui en a l'utilité, tu enfiles ton bonnet, qu'il couvre tes oreilles parce qu'il fait bien frisquet dehors malgré le soleil splendide et tu te cales ça dans les oreilles, ma fille. Ouste !

    L'année est bisextile, so what.

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  • J'ai donc expérimenté l'aquarium à fumeurs, ce mouroir honteux mais libéré des regards, infect, vraiment insupportable en odeurs, planquant ma culpabilité sous mon manteau parce que cette loi m'aura de fait enjointe à finalement choisir de ne pas arrêter. Ne pas arrêter, non de fumer je m'en tape et je me tue si je veux, mais ne pas arrêter de me demander quelles formes absurdes prend aujourd'hui cette accélération vers le vide, la disparition. Donc j'en suis encore à fumer, à avoir repris à fumer, plus exactement, bien consciente, balablabla, de la crapulerie des industries du tabac, blablabla, et de celle de l'Etat, blablabla. Je fume et lorsque je ne fume pas c'est indicible, intime.

    J'étais là dans ce bar pour la simple raison qu'après avoir marché dans la nuit comme j'aime faire, aucune importance, je souhaitais manger un kebab et me poser pour ce faire. J'étais là, c'est un samedi soir, un de ces soirs noyés de circonstances où les morts sur la route oublient semaine après semaine que c'est bien là que ça se passe, pour ce qui les concerne. Sur une route de campagne que je connais trop bien, aveuglée par la brume, tué par le verglas. Sur une route dont l'aspect ineffable, improbable et hors-temps, avec ses silhouettes d'arbres déchus découpés sous la lune, t'apprend dès l'aube à quel point tout s'efface comme la bouse des vaches qui n'y sont plus disparaît sous la terre sans que tu le voies à moins de te pencher dessus. Sur une route de campagne un samedi soir retour de boîte, le terme de boîte fut bien choisi, bien que je n'y allais pas, autorisée seulement à rouler à vélo et me contentant en conséquence de faire quinze bornes pour me désennnuyer sous le regard de garçons aux fêtes de bleds autour à jouer d'auto-tamponneuses comme on se forge un avenir, à se coller contre un arbre au bal disco où l'orchestre est trop naze qui ne joue que Sheila et consorts, à se faire chier absolument et totalement concentrée sur l'ailleurs - maladif ailleurs et autre - avec pour seul désir de reprendre la route effrénée en vélo, rentrer et sous les écouteurs punkiser pour survivre.

    Hiver interminable, la maison encore en travaux depuis si longtemps, on se lavait à l'eau froide et papa a toqué à la fenêtre qui était pourtant ouverte parce que j'aimais sentir l'air froid, l'air chaud, l'air des saisons qui me rappelait le bock du Sud-Ouest où l'on faisait une toilette de chat dans le village en oubliant que les chasseurs allaient ramener leur proie puante qui faisanderait des jours entiers sous nos yeux d'enfants nés en ville, il a toqué à la fenêtre pour m'annoncer que tu étais mort. Comme ça. Comme il a pu. Sans rien révéler de son doute. Dix-huit ans. Quelques mois de plus que moi. Ce soir le sol glisse comme un rêve noir et froid où le temps s'arrête pour me rappeler un paysage comme tant d'autres ravagé par la friche où plus un chemin ne permet la marche. Je me souviens de ta dépouille et de mon insupportation à lui faire face parce qu'on s'était roulé des pelles maladroitement et consciencieusement, toujours sous le même arbre près de l'école mais à l'abri des regards, parce que l'on s'aimait bien depuis les années d'école. Et à propos, on m'a raconté hier soir que Mao avait commandé l'extermination des passereaux tandis que j'avais pris une chaise dehors et que je ne comprenais pas comment aux cîmes des magnolias sous nos contrées, d'étranges et stridents chants exotiques semblaient prendre la place de nos zoziaux du coin, sales faiseurs de chiures acides comme nous chions des horreurs conceptuelles dont le résultat, hélas, tend au même désespoir. J'me demandais béatement à qui étaient ces cris sans comprendre qu'il s'agit d'enregistrements de la mairie destinés à les fatiguer à leur tour, écologie blabla, développement durable sponsorisé par macdonald, blablabla. Tu étais aussi beau mort que vivant avant que l'on t'enterre où je ne suis pas allée. Dans ce village désert où l'on essaie de vivre en rêvant au futur, loin des champs où l'on bosse en se flinguant les doigts et la colonne vertébrale, cette campagne atroce qui n'a plus aucun goût.

    Je ne souhaitais pas parler. Mais déjà il était trop tard, les odeurs de la poussière âcre me malmenaient en souvenir, ces poussières d'Amérique centrale, ces poussières de la Tunisie, de la Turquie, me semblaient déjà comme un cauchemar suinter de nos nez, tais-toi, tais-toi, cesse tes généralités insupportables qui désignent ton dieu et ton diable, toujours cette profanation de ma paix.
    - Les responsables, c'est ces salauds d'Américano-sionistes capitalistes.
    - Pitié.
    - Avant eux, jamais sunnites et chiites n'auraient eu l'idée de se battre.
    - Pitié.
    - Ces salopards de juifs qui mènent le monde.
    - Crucifiez-moi, je n'en peux plus.

    Parle, tente, essaie de soulever en toi ce rien qui y est apte.
    - Avec la déclaration d'indépendance du Kosovo, la fragmentation délétère du monde en entités ethniques-et-religieusement-pures s'impose sous le couvert de droits. Comment peux-tu supporter ça, toi de la bonne gauche révolutionnaire, hein ? Comment peux-tu ?
    - Vive l'indépendance ! Vive la liberté ! Chacun chez soi !
    - Dis-moi, toi, l'anti-américain, l'anti-impérialiste, l'anti-nationaliste, l'alter-suprême. T'éprouves aucun malaise, en l'occurrence ?
    - C'est le peuple kosovar qui décide ! Vive la liberté ! Vive l'indépendance !
    - Mais...
    - Les Serbes sont des salauds, comme les Israëliens. C'est un grand pas pour l'humanité !
    - Comment peux-tu... Ainsi... T'intéresses-tu au monde ?
    - A fond. La merde, c'est la faute aux Américano-sionistes !
    - J'ai peur. Je vais en refumer une.
    - Et moi je te dis comme mon copain. Allah lui, il est pur. Il n'aime pas les méchants.
    - Vite, servez-moi un verre.
    - Les Américains sont des cons. Les Chinois sont intelligents.
    - Oh... D'accord. Et vous, vous êtes la relève de la lucidité. J'ai vraiment rien compris, n'est-ce pas.
    - Hey connasse, t'as vu comment tu parles ? Tu me contredis et tu t'étonnes qu'il y ait des guerres !
    - Et priez Dieu que tous nous veuille absoudre...

    J'ai peur et je me souviens avoir lu aujourd'hui tout en cherchant un logement qui m'agrée - merci de bien vouloir retenir ma candidature - quelques écrits se targuant d'être drôles sur l'excellent site Causeur.fr où d'aucuns protégés de leur propre misère font le fun. Ah qu'il est spirituel de défendre Sarkozy contre ces meutes infâmes qui l'abattent sauvagement à propos de monarchie élective - il est en effet pertinent de s'y attarder longuement en se faisant les ongles, c'est éminemment essentiel -, qu'il est doux à l'oreille, qu'il est suave à la langue de rire de JFK et de son appel, rire, ce moyen de se tordre, me paraît en ce début de siècle la pire des barbaries parce que l'humour est mort en même temps que la pensée, que l'humilité à le faire, à tenter dire enfin. Dites-moi, ô loupiotes du consommateur qui pense, entre l'hystérie d'allégeance et celle des conchieurs en goguette, devrais-je choisir la posture supérieure, si supérieurement détachée d'entomologiste déjanté qui se gondole en écrasant les mouches ? Je salue Andy Vérol. C'est bien le rare, tiens.

    Il est tellement de bon ton de se montrer au-dessus de tout et surtout de sa ceinture en ricanant de l'horreur de la tolérance sectaire, ah oui, oh yeah, oh oui encore, trop bon trop fun, disons ainsi alors, oh yeah, tous ces cons que nous sommes, inatteignables par le fait même de ne jamais signifier depuis quel étage on parle. L'étage de merde dont il ne faut jamais parler. L'étage où ça pue la mauvaise cuisine et l'alcool bas de gamme. L'étage même pas connecté. L'étage tout juste portabilisé. L'étage sans nom que tu qualifieras, ô spirituel intellectuel, de Caliméro et de Zola sans même y référer, d'ailleurs, tu te sens tellement loin de ça. Toi. Qui blesses une fois de plus mon amour des penseurs qui pensent avec amour. Toi qui trahis à la face et au nom de tous ceux qui n'en veulent rien savoir ce terme même d'intellectuel. Celui-là qu'employait celui fauché par le verglas à l'heure où tout reste possible et certainement le désir absolu de vivre et de jouir du droit de comprendre. Toi qui te targues de ton esprit. Toi qui fais de la pensée une branlette grammaticale syntaxiquement parfaite. Tu trahis mes espoirs, ce soir. Tu trahis mon sens de la loi. Mon sens du sens.

    Ah, ce que ce bon ton m'atterre. Ce que c't'humour m'désespère où je me sens morale planquée sous le manteau noir crispée comme une statue d'onyx. Je vous emmerde, mes chers cyniques, mes chers ethniques, mes chers ludiques.


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  • M1 ayant encore frappé, savourez. Et que les mécontents lèvent la plume.

    C'est Mignon. Les sectes sont un non-problème selon Emmanuelle Mignon, la directrice de Cabinet de Sarkozy. Elle pense même que la scientologie devra exister en paix si elle ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Elle est mignonne. Tout ça c'est trop divin. La République française à l'heure du charlatanisme. Dieu par-ci, sectes par-là, Xavier Bertrand franc-maçon. Les Français ne savent plus à quel saint se vouer. Et même si Sarkozy dit avoir une position très ferme face aux sectes, la multiplication ces derniers jours des références religieuses et sectaires est plus qu'inquiétante pour la République. Sarko ne peut pas non plus faire oublier le fait d'avoir reçu Tom Cruise en 2004, personne de petite taille et ambassadeur par excellence de l'Eglise scientologique. Plus inquiétant encore, le gourou Sarkozy sombre dans la nimportenawakerie la plus profonde. La loose totale. Il est complètement largué de la réalité politique et semble irrémédiablement déconnecté de sa fonction. Sarkozy n'existe que pour les médias et par les médias et il perd ses moyens face aux sondages désastreux, face à son image négative et à la déconfiture annoncée de l'UMP aux municipales. Et comme un malheur n'arrive pas seul et que chez les Sarkozy on peut compter sur la traîtrise de sa propre maman, Dadou Sarkozy déclare soutenir Arnaud Teullé, le candidat UMP dissident à Neuilly. C'est devenu un bordel politique à ciel ouvert. Et avec l'arrivée de Sophie Favier dans la course électorale, on ne sait vraiment plus qui encule qui à Neuilly. Et parce que dans la famille traître je demande aussi le fils, Jeannot Lapin annonce sa candidature à la cantonale de Neuilly-Sud. Le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Les Français ont intérêt à s'accrocher à Dieu. Ou alors à un truc qui y ressemble.

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  • - Vous prendrez bien un coup de révisionnisme ?
    - Très peu pour moi.
    - Un 4cc de cynisme ?
    - Sans façon.
    - Une rasade de déni ?
    - Que nenni.
    - Un chouilla de négationnisme ?
    - Trop amer.
    - Une amnésie ?
    - Si vous avez de la sélective.
    - Désolé, c'est du tout ou rien. Hum... Un coma, peut-être ?
    - Parfait. Servez-moi un bon petit coma bien douillet.


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